20 novembre 2008
Saison 1 / Episode 4 : Quand l'Euthanasie devient Droit
Chantal Sébire.
Aujourd’hui encore, ce nom a une signification particulière pour qui se rappelle cette triste histoire.
Atteinte d’une rare tumeur au visage, cette femme fut défigurée et la souffrance la poussa à demander au Président de la République le Droit de mourir.
Les médias s’emparèrent de cette affaire et n’hésitèrent pas à en faire le sujet principal des journaux télévisés, allant même jusqu’à diffuser des images de la malheureuse à 20h, très choquantes et qui auraient pu remettre en cause la réelle sincérité des médias quant à leur volonté de mettre en avant la maladie de Madame Sébire.
Son calvaire se termina finalement le 19 mars 2008.
Elle décéda dans des circonstances mystérieuses, après que l’opinion publique ait eu le temps de prendre partie sur la question du droit de mourir dans la dignité.
La semaine dernière, un palier a été franchi, de l’autre côté des Alpes.
La Cour de Cassation italienne a rendue une décision qui fait déjà polémique, une jurisprudence qui risque de faire couler beaucoup d’encre.
En effet, elle vient de donner raison à un père qui voulait faire arrêter l’alimentation artificielle de sa fille, dans le coma depuis 1992 après un accident de voiture.
Le débat sur l’euthanasie fait partie de ceux qui reviennent régulièrement sur le devant de la scène.
Vincent Humbert en 2003, qui avait lancé la fameuse formule « Je demande le Droit de mourir », Christine Malèvre en 2005, infirmière qui sera condamnée pour pratique de l’euthanasie, et donc Chantal Sébire en 2008, sont les cas les plus récents et les plus médiatiques.
Qu’est-ce que l’euthanasie ?
Selon Le Petit Larousse, l'euthanasie est une pratique visant à provoquer la mort d'un individu atteint d'une maladie incurable qui lui inflige des souffrances morales et/ou physiques intolérables, particulièrement par un médecin ou sous son contrôle.
La Cour de Cassation italienne s’est attiré les foudres de l’Eglise en rendant cette décision, mais nous n’évoquerons pas aujourd’hui la relation Euthanasie/Religion, plutôt la relation Euthanasie/Ethique.
Le Droit a donc donné son aval au père pour qu’il mette un terme à la vie de sa propre fille.
Afin de nous pencher de manière efficace sur l’Euthanasie, nous allons partir de la phrase de la définition de l’euthanasie et la scinder en deux, afin de confronter chaque partie au sens de l’éthique.
Evidemment, les débats sur l’euthanasie sont éternels, nous nous efforcerons simplement de nous approcher de ce qui pourrait être un semblant de Vérité.
« Une pratique visant à provoquer la mort d'un individu […] par un médecin ou sous son contrôle »
Nous ne pourrons pas facilement nous séparer de la substance même de l’euthanasie : la Mort.
Principal argument des anti-euthanasies, point sur lequel les pro-euthanasies se doivent de bien savoir répliquer, l’euthanasie c’est avant tout donner la mort à un être humain.
De quel droit pourrait-on donner la mort à une personne ?
La peine de mort est abolie depuis 1981 en France. Bien que certains remettent en cause cet acquis, les faits divers de notre temps, de plus en plus horribles ne nous le cachons pas, inondant les médias et les poussant à vouloir mener à la potence chaque personne vue à l’écran.
Pouvons-nous légitimer le fait de « laisser mourir » des êtres humains alors que l’une des caractéristiques de notre République est dorénavant de dénoncer la peine de mort.
Bien sûr, et là est la réponse, nous ne traitons pas de la même « Mort ».
L’euthanasie traite des personnes qui sont dans un état de maladie incurable, comme nous le verrons plus tard, alors que la peine de mort s’intéresse aux personnes ayant commis des crimes.
Néanmoins, au-delà de cette différenciation, le résultat est le même, alors comment peut-on considérer comme acceptable le fait de donner la mort à une personne ?
Décider de la mort de quelqu’un est-il un Droit que l’on peut légitimer ?
A première vue, non, jamais nous ne pourrons justifier de la mort d’une personne n’ayant jamais commis d’actes graves dans sa vie.
Enlever la vie à une personne est un Droit que l’Homme ne peut détenir, quelque soit sa position (médecin, Président, proche), sinon chaque crime trouverait des motivations telles que les criminels seraient tous en liberté.
Pourtant, et c’est là la particularité, enlever la vie dans le cadre de l’euthanasie est perçu d’une façon plus qu’originale par la personne agissant ainsi : elle le fait pour rendre service à la personne agonisante.
C’est ainsi que nous constatons que, par la pire des actions, une personne cherche justement le contraire, effectuer la meilleure chose pour la personne souffrante.
Tout l’ambigüité de la notion est ici : il semble alors que l’on puisse légitimer le pire des actes car c’est tout simplement dans l’intérêt de la personne, une personne qui, elle-même, a accepté de s’éteindre pour mettre fin à son calvaire.
Peut-on excuser les personnes faisant acte d’euthanasie ? Ce ne sont pas de vraies criminelles, malgré le fait qu’elles enlèvent une vie.
Ici, il convient donc de faire un rappel à la notion d’intention que nous avons croisé dans l’article « Le Dilemme Fou », afin de différencier clairement criminel et personne « aidant à mourir » :
La personne aidant à mourir ne veut pas tuer pour tuer, non, elle veut soulager les souffrances extrêmes auxquelles une personne est soumise.
Bien que cela soit difficile à concevoir, la Mort est la seule solution envisageable et elle outrepasse son raisonnement afin d’aider à mourir.
Plus que de simples actrices de la Mort de la personne, les personnes pratiquant l’euthanasie se « sacrifient » pourrait-on dire : elles connaissent les enjeux d’un tel acte, mais elles le font tout de même, dans l’intérêt de la personne.
Le criminel, lui, n’agit évidemment pas dans l’intérêt de sa victime. Quelque soit sa motivation, ce n’est surtout pas par compassion qu’il va donner la Mort à la personne.
De ce fait, autant le résultat est le même (le décès d’une personne), autant les raisons sont différentes, et on ne peut donc pas mettre sur un pied d’égalité criminel et personne pratiquant l’euthanasie, alors que c’est le rapprochement le plus souvent effectué par les anti-euthanasie, leur principal argument contre cette pratique.
Le père d'Eluana
« la mort d'un individu atteint d'une maladie incurable qui lui inflige des souffrances morales et/ou physiques intolérables »
Nous pouvons donc continuer maintenant sur les raisons d’un tel acte.
La compassion, la pitié, autant de sentiments qui poussent à commettre l’irréparable.
En effet, les personnes potentiellement victimes d’euthanasie sont des personnes dont la situation est extrême, que ce soit sur un plan physique ou psychologique.
Malheureusement, la considération d’une « maladie incurable » est bien subjective et dépend de la personne voulant aider l’autre à mourir : à partir de quel moment peut-on dire qu’une maladie est « incurable » ?
Evidemment, la science fait son entrée ici car c’est la médecine qui permet de faire des analyses poussées permettant de déterminer les chances d’amélioration de l’état de la personne.
Mais il n’est pas fait état d’une liste de « maladies incurables » et il faut donc procéder au cas par cas.
Les situations de coma profond sont les cas les plus rencontrés, avec ceux des personnes atteintes d’un fort handicap.
Le désespoir compréhensif des familles des victimes accentue cela : la situation est mentalement horrible à vivre, pour les proches comme pour la personne concernée quand elle est consciente.
Alors, un contexte si extrême légitime-t-il l’impensable ?
La plus grande contradiction inimaginable prend donc forme sous nos yeux : accepter l’idée de pouvoir mourir pour ne plus souffrir.
L’éthique est donc mise à mal ici, car si elle se base sur le bon sens en premier lieu, comment pourrait-elle alors accepter de laisser souffrir des êtres humains ?
Mais l’éthique qui accepterait que l’on « tue » des gens, ne serait-ce pas un comble d’autant plus choquant ?
Source :
Article
http://www.lexpress.fr/actualite/societe/euthanasie-en-it...
14:19 Publié dans Monde | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : euthanasie, mort, italie, droit
Commentaires
Je n'ai pas tout lu, je voudrais juste revenir sur le cas de Chantal Sébire. Je vais être politiquement incorrecte, mais je m'en fiche. Je ne comprends pas l'action de cette femme. Autant je comprends celle de Marie et Vincent Humbert, autant elle, je suis circonspecte. Cette femme, bien que dans un état de santé très difficile, était capable de mettre fin à ses jours, par elle-même. Le suicide n'est pas répréhensible aujourd'hui.
J'ai deux théories sur le sujet. Soit les médias se sont emparés de l'affaire et en ont fait le symbole du droit à l'euthanasie et cela s'est fait sans qu'elle en soit partie prenante. Soit au contraire, elle a utilisé tout ça pour se faire de l'argent.
Je choque quelqu'un là ?
Je ne nie pas du tout ses souffrances, bien au contraire. Je compatis totalement. Toutefois, je ne vois pas pq elle réclamait, pour elle, le droit à l'euthanasie, alors qu'elle était tout à fait capable, physiquement au moins, d'avaler des médicaments. Chose que Vincent Humbert ne pouvait faire car paralysé. Son cas n'a rien fait avancé et c'était juste pour provoquer une émotion dans l'opinion publique. Les médias en raffolent et nous, pauvres moutons, suivons. Pour moi, l'utilisation de son cas a été une manipulation perverse de l'opinion publique. Et je suis contre ça.
Néanmois, je suis pour le droit d'euthanasie dans des conditions hyper supra restrictives que j'exposerai lors de ma future campagne présidentielle.
Écrit par : Portalis | 26 novembre 2008
Bonjour, je suis effaré par cet article ! ou est la vrai recherche, on dirait une pseudo dissert de philo de lycéen. Elle n'aborde à aucun moment le fond du problème.
C'est sans doute car il faut être soignant, infirmier plus que médecin d'abord pour prendre le problème dans le bon sens.
A quel moment part-on de la personne qui fait la demande? s'intéresse-t-on à ses motivations? à ses autres propos?
Le problème dans ce débat c'est que bien souvent, ceux qui s'en empare, comme ici, ne connaisse pas vraiment le sujet et n'ont jamais accompagné de personne en fin de vie.
Cet article est contre-productif.
Écrit par : Capide | 06 mai 2009
En effet Capide, je ne suis pas le mieux placé pour parler de ce problème, mais je ne prétends pas prêcher la bonne parole.
Je pars de faits et livre une analyse, un point c'est tout.
Néanmoins, j'aurai aimé que tu livres une analyse à ton tour car s'en tenir à critiquer cet article comme contre-productif (au moins ça ne te laisse pas de marbre, ce n'est donc pas si contre-productif que ça), sans donner d'arguments quelconque pour défendre ta position, est un peu "facile".
Je rappelle ici que le but de ce blog est de reléguer les émotions au second plan, pour livrer une vraie analyse (ce pourquoi je peux parfois choquer).
Un soignant, infirmier, ou médecin, ne peut être objectif dans ce débat, car les émotions prendraient le dessus.
Des personnes extérieures, comme moi, si.
Écrit par : PM | 06 mai 2009
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