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23 novembre 2008

Saison 1 / Episode 5 : Hôtel Zéro Etoile

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Il peut sembler bien lointain le problème du confort à l’intérieur d’une prison quand l’on est assis sur son canapé et que l’on ne vit cette situation qu’à travers les images des médias.

Pourquoi donner une quelconque importance aux mauvaises conditions dans lesquelles vivent des loubards et autres criminels ?

Après tout, les détenus ont tous une bonne raison d’être derrière les barreaux, et le comble serait qu’ils soient emprisonnés dans des cellules luxueuses, ce qui donnerait un aspect somme toute ironique à la répression.

Bien que cette remarque soit logique, il n’en reste pas moins que le débat des conditions de vie à l’intérieur des prisons de l’hexagone, a priori insolite, mène à un sujet bien plus primordial : le respect de la dignité humaine.

Nous allons rappeler ici la définition de la Dignité Humaine que donne Le Petit Larousse, à la fois simple et explicite : Respect que mérite quelqu'un ou quelque chose.

S’il y a bien un lieu ou le concept de dignité humaine est mis à mal, c’est à l’intérieur d’une cellule.
Pourtant, passant sur les personnes se trouvant emprisonnées, on peut difficilement concevoir que celles-ci soit dépourvues de « Respect », restant des êtres humains, quelque soit leurs actions antérieures.

Il va donc falloir analyser la Dignité Humaine en ce qu’elle est bien plus qu’une simple expression, un des fondements d’une société se voulant démocratique au possible, tout en jonglant avec le côté nécessairement répressif que sous-entend une détention.

Prison, lieu de répression.

Le milieu carcéral est avant tout destiné à séparer les éléments perturbateurs du reste de la société.
Les détenus y purgent une peine afin de répondre de leurs fautes commises par le passé, ce qui insinue qu’ils sont punis pour leurs agissements, cette punition ayant un caractère à la fois temporel (durée de la peine), matériel (actes possibles limités pour ne garder que le strict nécessaire à la vie du détenu) et psychologique (environnement hostile).

Si les éléments temporel et matériel de la punition sont un minimum en vue de la réhabilitation du prisonnier, l’incidence psychologique d’une détention est un facteur bien plus contesté.
Certains observateurs n’hésitent pas à pointer du doigt le système carcéral en lui-même, un système qui aurait plus d’effets néfastes sur une personne que n’importe quelle autre solution, allant même jusqu’à affirmer que les prisonniers sont plus dangereux après leur sortie de prison qu’au moment de leur entrée.

De ce fait, les critiques ont souvent fusées sur les mauvaises conditions dans lesquelles vivent les détenus, ce qui pourrait toucher leur force psychologique de manière démesurée, achever ce qu’ils leur reste de morale et être réellement mis sur les rails menant à une réintégration réussie dans la société.


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Cellules délabrées, surpopulation, mauvaises conditions d’hygiène, ambiance étouffante, humiliations, autant de thèmes présents sur la liste non exhaustive des défectuosités relevées dans le milieu carcéral.

Au-delà de cette vision bien négative de la prison, pouvons-nous légitimer de telles situations ?
Les plus radicaux y trouveront facilement leur compte : criminels, violeurs, récidivistes, dealers, pourquoi leur accorder un semblant d’humanité alors qu’ils ont commis des actions par nature intolérables ?
Après tout, si l’on faisait des concessions aux détenus, ne serait-ce pas le monde à l’envers ?
Ils ont commis une faute, il faut les punir. La cellule est trop petite ? Leur intimité est violée ? Les gardiens de prisons sont trop sévères ?
Dans ce cas ils n’avaient qu’à ne pas faire des actes répréhensibles, tout simplement !

Même armé d’objectivité, il semble difficile de défendre un violeur d’enfants quand il conteste les conditions sanitaires à l’intérieur d’une prison, c’est vrai.

L’étude ainsi faite, nous en revenons donc au tout premier constat : pourquoi s’intéresser aux conditions de détention de personnes que l’on hait dès que leur visage fait la Une de l’actualité ?

Dignité Humaine, concept touché d’Universalité.

Malgré l’aspect choquant que peut avoir ce raisonnement, il faut avant tout rappeler que les détenus sont des êtres humains, dont l’immense majorité se destine à recouvrer la liberté au terme de la durée de détention.

Dans son travail de réinsertion des détenus dans la société, le système carcéral se doit donc de répondre à un minimum de leurs besoins.

Dès lors, force est de constater que ce travail semble délaissé quand l’on s’intéresse un tant soit peu à l’environnement dans lequel évoluent les prisonniers.

Surtout, la Dignité est liée, nous l’avons vu plus haut, au Respect.
Les plus réfractaires auront là aussi matière à critiquer : Pourquoi respecter des criminels ?

Vous l’avez compris, quelque soit l’angle depuis lequel nous essayions d’attaquer ce problème, l’éternel obstacle est toujours présent en ce sentiment de vouloir défendre les indéfendables.

A cela il est néanmoins possible de répondre : nous devons dépasser le stade de « criminel à punir » pour accéder à celui de « humain à améliorer ».

Dans « Le Dilemme Fou », nous avons croisé l’idée paradoxale selon laquelle les personnes faisant preuve de discernement était d’emblée punies, alors que des personnes qui ne comprendront peut-être jamais la portée de leur faute vont se voir offrir une deuxième (troisième ?) chance.

L’utilité de respecter les prisonniers se doit d’être soulignée, tout simplement pour deux raisons :
D’abord, cela fut évoqué précédemment, détériorer leurs conditions déjà bien réduites ne peut qu’avoir des effets négatifs sur eux et plus les conditions de détention seront mauvaises, plus le détenu penchera du côté pervers de la détention, retrouvant sa liberté avec une conscience bien plus « endommagée » que le jour précédant son entrée dans le milieu carcéral.
Ensuite, car nous sommes dans un Etat de Droit, dans LE pays des Droits de l’Homme (bien que cela sonne plus comme un refrain démagogique et patriotique), et que faire si nous traitions encore plus mal des détenus que ne le permet la morale ?
Quel paradoxe de traiter les détenus d’une manière pire qu’eux-mêmes ont traités leur(s) victime(s) ?
Evidemment, cette interrogation volontairement exagérée n’a d’autres buts que de mettre l’accent sur le fond du problème : un système carcéral qui serait plus violent qu’un criminel…


Se poser en défenseur de Droits Universels plutôt qu’en défenseur de prisonnier est donc un élément d’une grande importance afin de mieux cerner l’utilité d’améliorer les conditions de vie à l’intérieur d’une prison, bien que nous ne souhaitons pas non plus donner un confort privilégié à des personnes ayant violées la loi.

Malheureusement, réflexion faite sur la nécessité de se diriger vers un système carcéral amélioré, soyons un instant dans un esprit politique : une telle envie, si envisageable soit-elle, à un coût.

Bien plus que le problème de savoir s’il faut aller dans le sens des détenus, le réel obstacle réside dans le fait de rendre possible ce désir.

Réel intérêt politique ? Piège financier ? Qui voudrait s’occuper d’un tel problème dans le contexte actuel ?

Si, déjà, la question de vouloir est difficile à aborder, la question de pouvoir est bien plus préoccupante.

Nul doute que le débat, déjà récurrent, deviendra, d’ici quelques années, une véritable épine qu’il sera difficile de retirer du pied de cette bonne Marianne.

Sources :

Article
http://www.lexpress.fr/actualite/societe/les-prisons-fran...

21:47 Publié dans France | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : prison, dignité, droit

15 novembre 2008

Saison 1 / Episode 3 : Le Dilemme Fou

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Hôpital Psychiatrique Saint-Egrève, Grenoble

Un schizophrène qui s’évade d’un hôpital psychiatrique et va s’acheter un couteau avant d’aller poignarder mortellement un étudiant de 26 ans, voici le triste scénario qui s’est déroulé à Grenoble et qui a fait la Une de l’actualité cette semaine.

Les médias ce sont bien vite emparés de cette information pour relancer le débat épineux de la responsabilité des personnes déséquilibrées.

Il faut avouer qu’un tel fait laisse perplexe.

Néanmoins, malgré la proximité des faits, nous devrons mettre l’émotion de côté afin de ne pas faire preuve d’un jugement faussé.

Alors, comment réagir face à un tel acte ? Comment considérer les personnes déséquilibrées mentalement ? Devons-nous privilégier la prévention en les coupant définitivement du monde extérieur, ou devons-nous mettre en avant la répression en continuant de faire opérer le système actuel mais en les punissant justement en cas de faute ?

La réflexion est ici de mise car il va falloir à la fois jongler avec nécessité et besoin, logique et éthique, Droit d’être un citoyen libre et Droit d’être un citoyen protégé.

Malade mental : Sujet à part ?

Nous n’évoquerons que rapidement la considération d’une personne déséquilibrée par le Droit, civil comme pénal, pour rester dans l’objectivité la plus juste, l’éthique étant primordiale dans un tel cas.

Tout d’abord, le malade mental est « différent » d’une personne normale en ce qu’il n’est pas doté, selon le Droit Pénal comme le Droit Civil, de discernement.

Discernement ?

Le discernement est la faculté de reconnaître distinctement en faisant un effort des sens (vue, ouïe,...) ou de l'esprit, ou de tous ces éléments conjugués.

Ainsi, le malade mental ne distingue pas l’aspect des choses, il ne peut distinguer les bonnes actions des mauvaises, il ne différencie tout simplement pas le bon du mauvais, et c’est là que l’importance de la notion de discernement prend tout son sens : Comment pourrions-nous mettre sur un pied d’égalité une personne comprenant la portée de ses actions et une personne totalement détachée d’un minimum de raisonnement ?

Dès lors, une nette différence apparaît déjà, et elle va grandement influer sur le reste de la réflexion.

Comme l’on dit, « à circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles » et il va sans dire que c’est un moindre mal dans la présente étude.

Rappelons que l’homme ayant poignardé l’étudiant n’en est pas à son coup d’essai : il avait déjà agi de la même sorte trois fois auparavant.
Pourquoi ne pas l’avoir enfermé pour toujours dès sa première faute me direz-vous ?
La réponse est prévisible : car c’est un malade mental, il n’a pas la faculté de raisonnement suffisante, et donc on ne peut le punir comme une personne qui aurait fait délibérément le même geste tout en en ayant bien conscience.

Le débat se situe ici.

Pourquoi ne pas considérer légalement de la même sorte personne capable de discernement et personne déséquilibrée ?

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La personne équilibrée fera elle la faute en sachant que c’est une erreur, qu’elle n’a pas à le faire. Elle a conscience de sa faute avant même de l’avoir effectuée, et ainsi la volonté d’agir la condamne naturellement : elle a agi en son âme et conscience, aurait pu être raisonnable et éviter cela, mais non.
Elle est sanctionnée pénalement, dans le cas d’une tentative de meurtre comme ici par exemple.

Le déséquilibré, lui, ne prend conscience de sa faute qu’après avoir mal agi, et ce dans le meilleur des cas, sinon il agira et quelques heures plus tard il aura déjà oublié son erreur.
Il n’a pas forcément eu la volonté d’agir ainsi, mais il a agi tout de même, ne pensant pas aux conséquences que cela entraînerait.
La personne est placée en hôpital psychiatrique où elle va subir un traitement afin de pouvoir être réintégrée dans la Société.

Si dans les deux hypothèses la conséquence de la faute est un décès, autant la personne étant capable de discernement risque la peine capitale, autant la personne déséquilibrée suivra un programme psychologique afin de ne plus agir ainsi.

Certains l’auront peut-être déjà compris, il y a une énorme contradiction rien que dans la considération du discernement : on punit définitivement, c’est-à-dire à vie, une personne ayant compris qu’elle avait fait une erreur dans un cas, et on va donner une seconde chance, une possibilité de vivre à nouveau en société, à une personne qui ne comprendra peut-être jamais qu’elle a fait quelque chose de mal !

Sous cet aspect, l’émotion semble donc avoir raison, sans besoin de raisonnement : l’injustice est faite qu’un déficient mental puisse s’en tirer malgré l’horreur de ces actions, alors qu’une personne « psychologiquement supérieure » traînera tout au long de sa vie, comme un boulet, son erreur.

Malade mental : Citoyen avant tout.

L’accent doit dès lors être mis sur la finalité des hôpitaux psychiatriques.

Des « prisons pour malades » ? Pas sûr.

Les hôpitaux psychiatriques, bien qu’ils se doivent de contenir certains éléments écartés de la société, se doivent aussi de rendre possible la réintégration en société de l’individu et pour cela toutes les solutions sont envisageables, notamment, lorsque l’état de la personne le permet évidemment, des permissions de sortie pour aller faire un tour en ville.

cornierchefservice.jpg Le Professeur Cornier, Chef de Service de l'hôpital psychiatrique de Saint-Egrève

Le Monde à l’envers ? Du moins ça y ressemble : Une personne potentiellement dangereuse sans qu’elle-même ne puisse s’en rendre compte mise en liberté dans une ville !
Précisons ici que le déséquilibré de 56 ans avait beau s’être évadé de l’hôpital psychiatrique, il faisait l’objet de permission comme tout autre « patient », alors que son lourd passé était connu de l’établissement.
Devons-nous craindre pour notre propre sécurité ?
Cela relèverait de la paranoïa de répondre ici par l'affirmative. En effet, il aura, malheureusement, fallu attendre un tel drame pour que les lumières des médias pointent cette situation.
Néanmoins, force est de constater que d'autres agressions du même genre ne sont pas monnaie courante, et donc la paranoïa, si facile à faire naître en chacun, se doit d'être écartée.

Alors, serait-ce la paranoïa qui ait poussée l'opinion publique à relancer le débat de la responsabilité des incapables majeurs ?
Il y a fort à penser que oui.

D'un autre côté, il est nécessaire de souligner que le système fait état ici d'une faille bien embarrassante, car si la volonté est aujourd'hui, logiquement, d'accentuer la prévention en modifiant le système d’encadrement des malades mentaux, cette volonté ne suffira peut-être pas pour trouver une meilleure solution, une solution alliant liberté des incapables et protections des citoyens étant un véritable défi qui est loin d’être relevé à l’heure actuelle.

Bref, on ne peut donc qu'être un semblant fataliste après ce fait divers, même si, rappelons-le, le malade mental s'était échappé et on ne peut ainsi généraliser la crainte d'un tel acte à tous les incapables majeurs, ce serait remettre en cause l'efficacité même du système judiciaire.

De ce fait, le système présent s’apparente plutôt à la « moins pire des solutions », n'étant pas la meilleure, mais étant la plus adéquate afin de contenter chaque partie.

Un système à améliorer ? Oui, indéniablement.
Un système à bannir ? Non, tout simplement car il n'y a pas de meilleur système au jour d'aujourd'hui...

Alors, sur la responsabilité des malades mentaux, celle-ci ne peut être modifiée, sinon nous tomberions dans un système de pure répression, dénudée de toute notion d'humanisme envers ces personnes qu'il faut avant tout aider, avant de réprimer.
Mais le système encadrant ces personnes pourrait, lui, atteindre ses limites prochainement, et le besoin de l'améliorer ne s'est peut-être jamais fait autant ressentir.

Sources :

Une ancienne victime du malade mental raconte
http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5hyKq0w...

Un malade mental tue sa mère lors d’une permission
http://www.dna.fr/articles/200710/08/malade-mental-il-tue...

11 novembre 2008

Saison 1 / Episode 2 : Les Commémorations dans le Collimateur

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En ce lendemain de célébration de l’Armistice de la Première Guerre Mondiale, les faisceaux de l’actualité se tournent vers les célébrations que nous avons pour habitude de fêter chaque année.
En effet, l’historien André Kaspi est sur le point de rendre au secrétaire d’Etat aux anciens combattants, Jean-Marie Bockel, un rapport sur les commémorations, dénonçant la multitude des célébrations mémorielles.

Y a-t-il aujourd’hui trop de commémorations, de force qu’elles perdent leur portée symbolique, ou alors devons-nous leur accorder à chacune la même importance ?

Il serait mal vu de faire une distinction entre chaque date, afin de vérifier quelles sont les dates les plus importantes.

Pourtant, la principale idée de Monsieur Kaspi réside dans la conservation de seulement trois dates, plus précisément celle du 8 mai (Victoire des alliés sur les nazis en 1945), du 11 novembre (Armistice de 1918) et du 14 juillet (Prise de la Bastille, symbole de la Révolution Française de 1789).

Il y a actuellement douze journées de commémoration par an, mais là où le bas blesse, selon André Kaspi, c’est que six de ces journées ont été instaurée en seulement six ans, sur initiative du Président de l’époque Jacques Chirac : la célébration de l'abolition de l'esclavage (10 mai), l'hommage aux morts de la guerre d'Indochine (8 juin), l'appel du général de Gaulle du 18 juin 1940, l'hommage aux Justes de France (16 juillet), aux harkis (25 septembre) et aux morts de la guerre d'Algérie (5 décembre).

Alors, trop de commémoration tue la commémoration ?

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Jean-Marie Bockel, secrétaire d'Etat à la défense et aux anciens combattants

On ne peut que rappeler la riche histoire de France, marquée grandement par les deux guerres mondiales et les conflits internationaux qui s’en suivirent.
La logique veut évidemment que l’on se rappelle de ces principaux évènements, tous ayant contribué à la vie de notre patrie.
Sur quelles bases pourrions-nous justifier la sélection d’évènements plutôt que d’autres ?

Considérant que nous avons tous connus des moments marquant à un instant ou à un autre de notre vie, serions-nous enclin à en préférer certains plutôt que d’autres, bien que l’émotion ressentie pour chacun soit d’une même intensité ?

Le rapport d’André Kaspi pose le débat de la sélection apparemment impossible d’un nombre limité de dates commémoratives. Il convient donc de s’intéresser à cette idée.

La commémoration comme Devoir de Mémoire.

Le facteur mémoriel est le plus conséquent en ce qu’il est la substance même d’une commémoration : se souvenir.

Oui, se souvenir car si la France est ce qu’elle est aujourd’hui, c’est grâce à ces évènements historiques qui sont mis en avant lors des célébrations commémoratives.
Aujourd’hui 11 novembre, cette célébration est encore plus forte car c’est aussi la première fois que l’on effectue notre devoir de mémoire sans un des acteurs directs de la « Der des Ders » puisque le dernier Poilu, Lazare Ponticelli, nous a quitté le 12 mars 2008 à l’âge de
110 ans.

Le devoir de mémoire n’aura donc jamais eu autant de signification que cette année, le souvenir de la Guerre de 1914-1918 devant être entretenu est transmis aux générations futures, afin de ne pas tomber dans l’oubli.
Aussi fondamentale, la Victoire des alliés sur les nazis, en date du 8 mai 1945, doit elle aussi faire l’objet de cet hommage si particulier.

On ne peut évidemment pas remettre en cause la date du 14 juillet 1789, jour de la Prise de la Bastille, liée pour toujours à la Révolution Française (qui se terminera dix ans plus tard, ne l’oublions pas) qui mènera à l’instauration progressive de la République en France.
Notons ici que ces trois dates sont les seules que voudraient conserver André Kaspi.

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Qu’en-est-il alors des autres dates ?

Celles pointées du doigt par Monsieur Kaspi sont surtout celles dont l’instigateur fut Jacques Chirac, entre 2000 et 2006 :

La première, celle de l’abolition de l’esclavage (10 mai) rappelle le Décret de Victor Schœlcher concernant la fin de l’esclavagisme dans les Colonies.
Ironiquement, la lutte contre l’esclavage fut aussi le principal argument des puissances coloniales pour pénétrer en Afrique…
Réduire l’importance de cette commémoration pourrait s’apparenter à une véritable maladresse, autant éthique que technique, dans un pays comme la France où l’on compte plus de 4,5 millions de noirs, principales victimes de l’esclavagisme, et à peine une semaine après le sacre de Barack Obama dans l’un des pays ayant pratiqué le plus l’esclavagisme durant son histoire.

L’hommage aux morts de la Guerre d’Indochine (8 juin) permet de revenir sur la défaite de Diên Biên Phu, en 1954, en célébrant les soldats décédés à cette occasion ainsi que durant le conflit face au Viêt Minh d’ Hô Chí Minh, conflit qui aura d’ailleurs été très impopulaire en France.
Nous pouvons y rattacher, dans le même domaine, l’hommage aux morts de la guerre d'Algérie (5 décembre).

L’appel du général de Gaulle du 18 juin 1940, point de départ de la résistance durant l’occupation allemande, a ainsi une portée symbolique unique. Surtout, cette date est à lier à celle du 8 mai 1945 en ce qu’elle traite du même sujet qu’est la deuxième guerre mondiale.
Soulignons ici que le rôle des résistants dans la victoire de 1945 n’est aujourd’hui plus à démontrer et pourrions-nous donc conserver la célébration du 8 mai 1945 tout en mettant de côté la date de naissance de la révolte française ayant grandement participé à la défaite du nazisme ?

Enfin, l’hommage aux Justes de France (16 juillet) et aux harkis (25 septembre).
Les justes de France sont, selon la définition du terme, ceux ayant procurés, au risque conscient de leur vie ou de leur intégrité corporelle, spontanément et sans espoir de contrepartie, une aide véritable à une personne se trouvant en situation de danger ou de péril immédiat.
Cela fait échos aux personnes ayant aidés des juifs durant, encore une fois, la deuxième guerre mondiale.
Quant aux harkis, ce sont les soldats musulmans engagés aux côtés de l’armée française durant la Guerre d’Algérie (1954-1962).

De nouveau, ces dates permettent le souvenir de périodes primordiales pour la France, même si elles visent une minorité.

Vous l’aurez compris, ces six célébrations sont essentielles, que ce soit pour les personnes concernées en premier lieu comme pour la France, faisant référence à des épisodes marquants de son histoire.

Néanmoins, après avoir fait un constat des six évènements, certains se rapportant donc à de mêmes périodes (seconde guerre mondiale par exemple), pourrions-nous rationaliser le nombre de commémorations, comme le désire Monsieur André Kaspi ?

Le Désir de Rationalisation.

Au-delà de l'aspect controversé de l'idée de ne garder que trois dates clés, il convient de faire état d'un possible manque de lisibilité en cas de multitude de commémorations, sans oublier une possible désacralisation du concept, par le biais d'une banalisation.

Quelles solutions adopter ? L'intention de réduire le nombre de commémorations est louable, mais encore faut-il ne pas oublier certaines d'entre elles.

Vous l'avez peut-être entendu ces jours-ci, la date du 9 mai comme nouvelle journée de commémoration est envisageable.

Le 9 mai 1950, c'est le jour où Robert Schuman et Jean Monnet ont jetés les bases de l'Union Européenne, date toujours considérée comme la naissance de l'UE. Aujourd'hui, elle est dite "Journée de l'Europe".

Ajouter une nouvelle date de commémoration pour en supprimer d'autres ?
C'est en tout cas une des éventualités.

Reste à savoir si la date du 9 mai pourra allier commémoration à portée nationale comme européenne.

Nul doute que si ce rapport a vocation à amener de réels changements en réduisant le nombre de commémorations, la solution pour contenter toutes les minorités concernées par les célébrations habituelles va devoir faire preuve d'ingéniosité.

Sources :

Lazare Ponticelli
http://fr.wikipedia.org/wiki/Lazare_Ponticelli

Les noirs en France
http://www.jeuneafrique.com/jeune_afrique/article_jeune_afrique.asp?art_cle=LIN01047com
bislitno0


L’immigration et la France
http://fr.wikipedia.org/wiki/Immigration_en_France#Donn.C3.A9es_statistiques_sur_l.E2.80.
99immigration


L’abolition de l’esclavage
http://fr.wikipedia.org/wiki/Abolition_de_l%27esclavage#M...

9 mai 1950
http://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=19500509